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Jour 15-Jour 16 – Puerto Montt-Puerto Chacabuco-Coyhaique

Jeudi 4 vendredi 5 février

 

Le sac est refait, départ vers 6h10 à l'embarcadère de Navimag. J'avais pas commandé de taxi, mais le jeune à la réception se charge d'en attraper un pour moi. Il fait bien : le chemin vers le port n'est pas sûr de nuit. Après un quart d'heure de bus, nous arrivons au vrai port de Puerto Montt où je vois enfin quelques bateaux, dont le « Evangelistas » dans lequel nous embarquons vers 8h. Les cabines de 4 sont tout confort, le lit est presque comme à la maison, et les repas sont copieux : inutile de dire que « Navimag » récolte une bonne note pour ce trajet payé 55.000 pesos, mais qui passe vite.

 

Le paysage défile dans une mer calme, seulement agitée au passage du golfe de Carcovado, où l'île de Chiloé ne fait plus rempart face aux paquets de mer venant du Pacifique. La nuit passe toute seule jusqu'au réveil dans le fjord menant à Chacabuco. À la sortie du ferry, je saute dans un minibus direction Coyhaique, et tape la discute avec un Canadien à la retraite, un physicien qui voyage avec un groupe de 5. J'erre ensuite une bonne demi-heure avant de trouver un logis, le tout après avoir trouvé un plan de la ville salvateur à l'office de tourisme. Une bonne grosse sieste plus tard, je pars faire les courses du soir en faisant un tour à la gare routière du coin : en ce vendredi soir, ça pue l'enlisement. Attention à ne pas rester bloqué trop longtemps ici. Mon expédition infructueuse sème le doute et, d'expérience, je sais qu'il faut vite agir. Sur le chemin du retour, je croise un groupe de Français aperçus sur le ferry et leur demande leur programme : bonne nouvelle, ils partent le lendemain à « Chile Chico », à la frontière argentine. Une des filles appelle le chauffeur et me met sur la liste, départ 9h. Parfait. Il valait mieux ne pas traîner.

Jour 17 – Coyhaique-Puerto Ibanez-Chile Chico

Samedi 6

 

Je retrouve donc le matin les Français rencontrés la veille pour prendre ce minibus conduit par Gustavo. Nous embarquons à 9h mais ne quittons vraiment Coyhaique que vers 10h30. Il s'agit en effet d'un service « à domicile » et 8 autres personnes prennent progressivement place à bord, au fur et à mesure que le minibus traverse les 4 coins de la ville, à flanc de montagne. Nous remarquons au passage qu'un versant entier a été ravagé par les flammes. Le bloc de granit qu'est la grande montagne surplombant Coyhaique fait elle penser à un gigantesque « orgue », avec une face découpée en tubes élancés. La route est ensuite splendide. Je découvre les premières vraies steppes patagoniennes, avant de traverser le lunaire parc de Cerro Castillo, que j'avais envisagé de visiter. Nous arrivons à Puerto Ibanez, où plutôt à son embarcadère qui consiste en une gare routière en chantier et une minuscule échoppe où on peut se réchauffer avec un café. Le vent souffle ben, et cest rassurant, c'est ça la vraie Patagonie.

 

La traversée du Lago General Carrera, paré d'un bleu turquoise puis plus profond aux nuances de cobalt, est splendide. 2H20 plus tard, nous arrivons à « Chile Chico ». Le village est pas grand : une rue principale , une petite promenade le long du lac, est c'est à peu près tout. Je chope une mini-chambre qui fera l'affaire pour la nuit, avant d'aller peaufiner mon bronzage en cette fin d'après-midi. Le village tourne au ralenti, c'est la région qui veut ça. Je me débrouille quand même aussitôt arrivé pour réserver ma place dans un minibus de « Juan Martin Pescador », l'homme à toute faire du coin qui fait aussi bureau de change, agence d'activités sportives et boutique de pêche. Je passerai la frontière argentine direction Los Antiguos, l'équivalent de Chile Chico côté argentin.

Jour 18 – Chile Chico – Los Antiguos

 

Dimanche 7

 

À 10h, nous partons en bus pour la frontière en compagnie du patron qui nous conduit. Petit accroc au poste de sortie du Chili, où l'on me demande un ticket fourni par les douanes à mon arrivée à Santiago, que je n'ai plus. On me file une petite copie à remplir, sans plus de problèmes, je retiens quand même la leçon. Le poste frontière est planté au beau milieu de nulle part, dans une steppe aride où le contraste topographique entre Argentine et Chili est frappant. À droite, les pics enneigés de la Patagonie chilienne, auxquels s'accrochent d'épais nuages. À gauche, les étendues désertiques, presque « lunaires » du grand sud argentin. Au milieu, une route, qu'une sorte de renard-fennec traverse tranquillement. Le bus nous dépose à la gare routière de Los Antiguos vers 11h30, déserte en ce dimanche d'été. En chemin, je fais connaissance avec Ilona, une Allemande d'une trentaine d'années en route vers El Chalten, également. Nous sommes rassurés qu'un bus parte le soir même, à 20h. Le prix fait en revanche un peu mal : 1200 pesos argentins, soit 60.000 pesos chiliens. Pas le choix.

 

Après un long après-midi passé à tuer le temps dans un village démesurément grand par rapport à sa population, nous nous retrouvons pour monter dans le bus de « Chalten Travel », bien loin de faire le plein. Nous longeons pendant une bonne heure le « Lago Buenos Aires », qui est le même que le « General Carrera », mais dont l'appelation a changé et le passage de frontière. J'aperçois derrière la grande étendue bleue blanchie par le vent violent d'immenses collines désertes à perte de vue. Pour la 1ère fois, je prends la réelle dimension de l'immensité de ce territoire. Le chauffeur récupère quelques personnes de plus à Perito Moreno avant de nous emmener plein Sud au cœur de la nuit.

Jour 19 – Dans le bus vers El Chalten – El Chalten

 

Le trajet n'est pas de tout repos au sens strict du terme, puisque trouver le sommeil dans ce bus est mission quasi-impossible. À mon réveil (c'est un bien grand mot), le paysage est à couper le souffle : le massif du Fitz Roy, rosi par les premières lueurs du matin, nous fait face. La route est splendide, et nous arrivons à destination vers 7h du matin. Nous commençons notre quête d'un lit à 3, avec Felix, un jeune allemand, et un Belge (dont j'ai oublié le nom, pardon à lui). Les vingt minutes qui suivent sont une succession de «Désolé, on est complet ».

 

Je décide alors de continuer seul, suivant l'exemple d'Ilona qui a déguerpi seule aussitôt arrivée. C'est la loi de la jungle, mais dans ces cas là, c'est bien la seule règle à suivre. Je finis par arracher un lit dans un petit « hostel ». Le mec qui m'accueille est un Israëlien qui bosse là quelques jours avant de repartir. Il semble pas maîtriser le flux du matin, mais visiblement, une place se libère bien. Ouf. Je récupère une partie de ma nuit de 10h à 14h, puis pars faire mes dernières courses. Le supermarché est maigre en ressources, mais ça me suffit : j'avais pris le gros de la bouffe à Puerto Montt. Le temps est changeant. Des nuages, énormément de vent : j'y suis vraiment. Demain je retrouve la tente et les montagnes. Il était temps.

Au large de Chinquio
El Chalten
(les grosses dents au fond, c'est le Fitz Roy)

Jour 20 – El Chalten – Laguna Torre

Mardi 9 février

 

Mes coups d'oeil réguliers aux prévisions météo n'ont pas servi à rien. Au lendemain d'une journée très nuageuse, je me réveille ce matin de départ avec le grand bleu dehors. Quelques petits nuages restent encore bien accrochés au Fitz Roy, mais ne changent pas cette belle matinée qui s'offre à moi. Je décole de mon hostel vers 9h30 et prends le chemin de la Laguna Torre. Le vent m'oblige à garder une veste qui me tient un peu chaud, mais bon, il faut d'adapter. Au bout de 10 minutes, j'arrive à un poste de contrôle où un gars du parc se renseigne sur mon itinéraire. Il m'informe également qu'un sentier plus à l'Est est fermé, et qu'il faudra bien faire gaffe à ne pas l'emprunter sous peine d'amende.

 

Pas encore « entré » mentalement dans mon trek, je me fais une grosse frayeur lorsque les lacets de ma chaussure se bloquent dans la boucle de ma pompe droite. La chute en avant, lourde, est inévitable. Mon sac chargé à plein passe au dessus de ma tête et me plaque le front contre une grosse pierre tandis que mon genou droit en percute violemment une autre. Je me retrouve étalé sur le sentier poussiéreux, mais ça va. Un mec qui arrivait derrière moi m'aide à me relever et je reprends mes esprits. C'est un bon avertissement : j'avais pas lacé correctement mes pompes dès le départ, et la sanction est immédiate.

 

Le chemin continue jusqu'à un 1er mirador où l'on voit le Cerro Torre, qui ne va presque plus nous quitter de la journée. Le sentier nous mène dans de petits bosquets laissant place de temps à autre à de grandes trouées où j'aperçois l'imposant glacier en fond de vallée. À noter : je dépasse mon 1er groupe de touristes chinois. Ils s'étaient plutôt faits discrets jusque là. Plus je m'avance, plus la cime du Cerro Torre m'impressionne. Je comprends mieux pourquoi on a longtemps considéré ce pic perçant le ciel comme impossible à gravir, « invincible ». Je remarque un énorme bloc de glace qui demeure accroché par miracle à la paroi de l'aiguille dont la déclivité me semble même à certains endroits dépasser les 90 dégrès. J'arrive au « Campamento de Agostini » vers 12h30, le site dédié aux campeurs autonomes. Un autre emplacement, à quelques centaines de mètres, est lui réservé aux groupes encadrés. C'est une bonne chose.

 

Une fois ma tente montée, j'abandonne avec plaisir mon gros sac à l'intérieur et me rends à la Laguna Torre, où souffle un vent à décorner les bœufs. Je me trouve un abri de pierreset m'y pose, devant le splendide panorama d'un lac battu par les vents niché sous les imposantes cimes, dont celle du Cerro Torre. Le téléobjectif m'est bien utile, et je ne regrette pas de l'avoir amené en dépit de son poids. Il me permet de prendre de beau clichés des montagnes, mais aussi de deux oiseaux ressemblant à des faucons, qui virevoltent dans les airs. Pas farouches, ils se laisent assez facilement approcher. Je suis en tout cas bien content de mes photos. De retour au campement, je me réapprovisionne en eau au torrent. Il faut que je m'y fasse : je vais boire pas mal de terre ces prochains jours. L'eau descend du lac glaciaire dans de furieux tourbillons, qui la chargent en alluvions. Résultat: je bois une eau pas claire du tout, mais les dépôts qui la troublent ne sont pas dangereux. C'est la simple vie de montagne.

Rien à gauche, rien à droite, et au milieu, une frontière

Nous repartons dormir vers 8h30 avant de finalement lever le camp vers 12h30. Direction le Camp Poincenot, au centre du parc, et à 3h de marche environ. Le soleil tape fort au début, puis les nuages viennent faciliter notre avancée. En haut du « raidard », un immense plateau battu par les vents où sont posés trois lacs parents : la « Nieta », la « »Hija », et la « Madre ». Les bourrasques nous frappent de plein fouet, nous projetant d'épais nuages de poussière à la face. La progression est régulière, dans un paysage estampillé « 100% Patagonie » : rivières, haut-plateaux, vents surpuissants, et le Fitz Roy qui nous surveille sur notre gauche.

 

Le campement « Poincenot » où nous arrivons est plus grand. Les tentes s'alignent sur une butte couverte d'arbres imposants qui nous abritent partiellement des bourrasques balayant la vallée du nord au sud. Mark et moi allons nous rafraichir au torrent, les grandes gifles d'eau en pleine gueule font du bien. Avoir un visage propre est un luxe dans cette vie de trekkeur. Quelques parties de Uno nous mènent au dîner où un couple de texans puis un autre groupe s'arrachent mon réchaud. Côté jambes, ça va bien. Et elles seront utiles pour la montée de demain matin vers la « Laguna de los Tres »: 500m de dénivelé en une heure.

Jour 22 – Camp Poincenot-Laguna de los Tres – Camp Poincenot – El Chalten

Jeudi 11 février

 

Après une réunion au sommet et une longue concertation, l'heure du réveil est fixée à 5h22. Le temps n'est pas clair comme hier, et le vent a soufflé toute la nuit. Dans la tente, mon sommeil était accompagné du grondement sourd des blocs de glace s'écrasant en contrebas des glaciers, tandis que le vent devenait presque visible. Les puissantes bourrasques s'engouffrent dans la forêt tel un train hurlant, dont on entend le vacarme d'abord lointain se rapprocher à toute vitesse, transperçant le campement de part en part. Cette dimension quasi « physique » du vent est impressionnante et enivrante : on sent les respirations de la montagne.

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Au matin, nous commençons la montée sous de fines gouttes transportées par le vent. Je me suis trop couvert, et le froid n'est pas aussi vif qu'hier matin. A la lumière des frontales, nous progressons sur un sentier escarpé,, d'abord abrité puis très exposé où on a le temps de se bouffer un bon paquet de terre. Les nuages sont de la partie et nous privent des premières lueurs roses du jour sur les cimes. Pas grave : les conditions étaient « idylliques » hier, elles sont « typiques » aujourd'hui. Bruine, vent surpuissant, soleil perçant les nuages : c'est ça la Patagonie. Et le lumière nous offre même un splendide arc-en-ciel au dessus du Fitz Roy. Changer les objectifs de son Canon dans ces conditions est un calvaire mais j'y arrive. Au final, j'aurais pas dû : c'est con de risquer de souiller son appareil pour 3 clichés, d'autant plus que mon portable (qui lui est étanche) fait très bien le job. Le moment n'en reste pas moins jouissif : tout le monde semble comblé par cette « expédition » matinale face à la force des éléments. Au retour et après un 2ème petit-déjeuner, on repart se coucher vers 9h jusqu'à midi.

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Glacier du Cerro Torre

Jour 21 Camp Agostini-Camp Poincenot

Mercredi 10 février

 

La vie de camp a parfois du bon. Hier après-midi, j'étais reparti pour un 2ème tour à la Laguna Torre après avoir écrit les lignes du jour. A mon retour, le site s'est rempli et je fais rapidement connaissance avec Anne Sophie, qui voyage depuis quelques jours avec deux Anglais, Mark et George. Le courant passe de suite très bien et nous passons la soirée à déconner sur les rives de la Lagune, oubliant même par moment le Cerro Torre et le paysage grandiose sous nos yeux.

Les Brits ont ramené une brique de vin (horrible) que nous descendons avec courage, entre deux concours de ricochets sur le lac. C'est bien sympa, d'avoir de la compagnie, surtout si inattendue. Le lendemain,, je motive les troupes pour se lever aux aurores afin d'aller profiter du lever de soleil sur le Cerro Torre. Réveil à 6h pour une matinée sublime, où le rose flamboyant des premières lueurs du jour magnifie encore un peu plus les cimes. Anne So remarque un détail assez joli : une bande de terre coupant la glace et faisant penser à un homme debout dans la pente.

La pluie s'est désormais installée, et les arbres ne nous abritent plus. J'ai alors comme plan de rester sur place une nuit de plus afin de me rendre à la « Laguna Sucia », une « petite soeur » de la « De los Tres » à 1h30 de marche. Pendant ce temps là, les 3 compagnons de route font leur sac : ils rejoignent El Chalten cet après-midi avec l'ojectif de repartir ce soir vers le Nord. Quant à moi, je me prépare à une longue après-midi pluvieuse sous la tente.

 

Le temps reflète bien l'état d'esprit du moment. Je viens de vivre deux superbes journées en compagnie « surprise » de 3 personnes géniales, et je dois « m'y remettre ». Après l'arc-en-ciel, la pluie. Au fil des minutes, ma confiance en mon plan initial s'étiole, et la raison est bien simple : l'eau. J'évacue régulièrement les grosses gouttes accrochées à la voilure de la tente, mais je ne me fais pas d'illusions sur l'efficacité de la pratique sur le long terme. En réalité, il me revient en tête ce moment précis d'un soir de 15 août passé au fin fond de l'Irlande dans un camping d'Athlone avec Julien, un vieux de la vieille. Une pluie ininterrompue était tombée toute la journée, et notre tente avait commencé à prendre l'eau alors que nous nous apprétions à dormir en écoutant l'iPod. Nous avions été contraints de lever le camp en catastrophe, nous rabattant sur la salle de jeux du camping, équipée d'un canapé défoncé et d'une table de ping-pong. Sauf qu'ici, le 1er plan B est à 3h30 de marche, dans la vallée, et plus l'après-midi avance, plus je me mets à craindre le scénario d'une tente plus étanche en début de nuit. À 15h32, j'effectue un énième contrôle de routine sur les jointures.

 

En tournant la tête à gauche, je constate impuissant un léger filet d'eau ruisseler d'un coin. La prise de décision se fait en un quart de seconde: je dois partir, et le plus vite possible. Cet « imprévu » pas si imprévisible est beaucoup moins une « emmerde » qu'un soulagement. J'étais entre deux eaux, la nature a décidé pour moi. Et de façon radicale.C'est l'enseignement majeur de ce voyage, dont j'avais déjà un bel aperçu dans le Huerquehue : en solitaire, l'immobilisme est un danger. « Tu doutes ? Bouge de là ! » semble ainsi me lancer la montagne. Peu de stress découle de cette péripétie. En vrai, je prends plutôt ce retour obligatoire en catastrophe comme un nouveau défi. De toute façon, je n'ai pas le choix. Hors de question de tenter de "survivre" une nuit entière dans une tente sur laquelle je ne peux compter.

 

Dans mon malheur très relatif, j'ai la chance que la fuite arrive tôt. La même chose vers 21h, et c'était la certitude d'une nuit de galère. Je charge mon sac à mach12. Dans le mouveemnt, j'explose mon tapis de sol gonflable par précipitation. Tant pis, pertes et profits. Une fois mon sac prêt, je pars demander l'assistance d'un gars en train de finir l'installation de sa tente. Son coup de main est précieux pour accélérer le départ. « No problem » répond-il plusieurs fois à mes multiples remerciements. À genoux dans la boue, je fais une croix sur la propreté du matériel. Je roule « en vrac » la tente et parviens à tout caler dans la housse. Je suis plein de terre, mais finalement pas trop mouillé, et prêt à partir. C'est bien là l'essentiel. J'enfile le poncho en plastique que j'avais prévu au cas où pour ce genre d'occasions et charge mon sac sur le dos. Un dernier coup d'oeil à la carte pour m'assurer du chemin du retour, et me voilà parti vers El Chalten sous une pluie battante. Il y a 25 minutes, j'étais dans la tente en train de m'écouter du Dvorak. L'eau est arrivée juste avant le Allegro con fuoco. C'était marrant.

 

Je me lance d'un pas rapide et efficace dans le chemin du retour et tombe au bout de 10 minutes sur « Romain », un gars d'Annecy parti pour la journée et qui lui aussi, s'empresse de rentrer au village. Sa compagnie est un bonus inespéré. La conversation est toujours agréable, spontanée. Il me raconte la « Cordillère Blanche » du Pérou et de bolivie tandis que je lui conte mes aventures népalaises : un plaisir. Les 11 bornes sont gobées en moins de 2h (!) et j'arrive à El Chalten avec le sentiment de la mission accomplie, ou plutôt du défi relevé. Me reste encore une tâche : trouver un toit pour la nuit. Je choisis un hostel au hasard, qui s'avère être bien confortable. La soirée se passe en compagnei d'Aline et Lionel, un couple de Belges (attention cliché) bien marrants. Fait remarquable : ils passent à la télé chilieenne « Intouchables » en Français même pas sous-titré. Le film accompagne les 250 grammes de pâtes au fromage que je me descends, après une lutte âpre menée avec succès contre une boite de concentré de tomates. Quelle journée.

On dirait pas comme ça, mais ça souffle
Fitz Roy - 3359m

Véritable "mythe" de l'alpinisme, le Cerro Torre (ci-dessus) est considéré par beaucoup comme la montagne la plus difficile du monde, avec sa paroi de granit quasi-verticale de 800 mètres.

 

Son histoire est parsemée de légendes et de polémiques. En 1959, l'Italien Cesare Maestri entreprend l'ascension (encore jamais réussie) avec l'Autrichien Toni Egger. Selon Maestri, les deux atteignent le sommet, avant que Egger (qui détenait l'appareil photo) ne soit emporté par une avalanche dans la descente.

 

Sans preuves de son exploit, Maestri est peu à peu la cible des critiques, qui l'accusent d'avoir menti. En 1970, il "pète les plombs" et décide d'y remonter, seul, avec un compresseur et un perforateur, et trace la voie qui deviendra célèbre sous le nom de "voie du compresseur".

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L'histoire récente de cette voie et des derniers exploits sur cette montagne de l'impossible a fait l'objet de nombreux films et documentaires.

Un peu d'histoire

Les "orgues" de Coyhaique

Jour 23 - El Chalten

Vendredi 12 février

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On peut dire que la nuit a fait du bien. Pas autant quand même que la douche de la veille, mais les 11 heures de sommeil n'étaient pas de trop. Je serais bien resté une nuit de plus au même endroit, mais j'ai déjà réservé la nuit de vendredi dans le petit hostel d'avant le trek. Objectif d'aujourd'hui : en savoir plus sur mon trajet vers Puerto Natales. Je me rends à la gare routière pour choper les possibilités : un bus de nuit part cet après-midi et arrive demain matin. Au bout de quelques minutes de réflexion, je dis oui. Je passe retirer le maximum de pesos argentins au distributeur, mais les possibilités sont limitées. J'arrive à tirer 2500 en plusieurs fois, pas plus. Arrivé au guichet, je demande le prix : 4500 pesos (!!!). Je reste de marbre (en apparence seulement) face à l'annonce, disant que je vais « vérifier » que j'ai assez d'espèces (en connaissant la réponse). Je me contenterai du bus pour El Calafate de demain 8h, et après, on verra bien. Ca me confirme en tout cas que la vie est horriblement chère en Argentine, au moins comparé au Chili. J'ai 2300 pesos pour rallier la frontière depuis El Calafate. Après ça, je pourrai me permettre beaucoup plus de largesses. En attendant, régime sec.

 

Charly, un des guides qui crèche ici, me propose de partager le repas avec lui. Voilà qui ne pouvait pas mieux tomber. Malgré mon espagnol qui reste approximatif, on arrive à tenir une conversation presque normale et conviviale. Mine de rien, j'ai fait de bon progrès à force de baragouiner. Je prends également le temps de commencer les cartes postales, même si les photos du Cerro Torre ne tiennent pas la comparaison avec mes clichés matinaux de la Laguna Torre (autant ne pas jouer le faux modeste).

 

Sinon, je me suis mini-révolté aujourd'hui contre l'attitude de certaines personnes qui ne prennent visiblement pas la pleine mesure de l'endroit où ils se trouvent. D'aucun se plaignent ainsi que les supermarchés ne sont pas bien achalandés, que certains magasins n'avaient plus de sauce tomate depuis 2 jours, ou que le Wifi de leur hôtel ne fonctionnait pas. Faut-il leur rappeler que nous sommes au fin fond de la Patagonie, dans un village de 4.000 âmes relié à la civilisation par une seule route qui traverse 300 kilomètres d'étendues désertiques avant de rejoindre la "ville" la plus proche. Faut-il également leur dire que le Wifi passe par les paraboles plantées dans les jardins, et que par mauvais temps, le signal se fiche bien que le « client » « ait payé » pour la prestation, vu que les nuages bloquent le passage. Enfin bon. Côté moments sympas, ces retrouvailles avec Mariel, une Argentine adorable vue à l'aller, et qui me fait enfin goûter le traditionnel « maté ». Après 25 jours de voyage, il était temps.

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